La communauté Linux dénonce le caractère « biaisé » de l’étude d’IDC

L’étude, affirmant que gérer des serveurs Linux revient plus cher qu’avec une solution Windows, ne manque pas de faire réagir les défenseurs des logiciels libres : ils préfèrent se placer sur le terrain de la stratégie plutôt que sur celui des coûts.

La société d’études stratégiques International Data Corporation (IDC) a publié une étude qui déclenche une véritable levée de boucliers chez les professionnels du monde Linux et des logiciels libres.

Publiée mardi 3 décembre, elle (lire notre article plus détaillé) conclut tout simplement qu’un serveur fonctionnant avec un système d’exploitation GNU/Linux coûte, au final, plus cher aux entreprises qu’un appareil tournant sous plate-forme Windows de Microsoft. Cette enquête a été commanditée par Microsoft.

«Relativiser les résultats»

«Je crois qu’il faut en effet d’abord souligner qui sponsorise cette étude, ce qui permettra d’en relativiser les résultats», a déclaré à ZDNet Gaël Duval, cofondateur et directeur de la communication de Mandrakesoft, distributeur français de systèmes GNU/Linux.

«Étude payée, étude biaisée», lance quant à lui Nathanaël Makarévitch, acteur et militant de longue date des systèmes libres et ouverts; il est actuellement directeur de la recherche chez Idealx, fournisseur de services en logiciels libres.

Le principal argument de l’étude IDC est que les frais de personnel nécessaires pour l’entretien des serveurs sous GNU/Linux sont très supérieurs à ceux d’un système sous plate-forme Windows.

«C’est totalement aberrant», rétorque le responsable de Mandrakesoft. «Les administrateurs systèmes sont formés le plus souvent sous Unix, et, pour eux, le passage à Linux est bien plus naturel que le passage à des solutions Windows, ce qui limite encore davantage les coûts de formation à Linux.»

«De plus, je constate qu’il y a de nombreuses formations pour devenir un informaticien Windows, proposées par Microsoft ou par des organismes tiers, qui sont très coûteuses comparées aux formations pour systèmes Linux.»

Le prix n’est pas le meilleur critère de comparaison

L’étude assure également que l’entretien d’un système basé sur des serveurs GNU/Linux requiert d’avantage d’administrateurs que son équivalent sous Windows. «C’est totalement faux», rétorque Makarévitch. «Même si le salaire d’un administrateur Unix est supérieur à celui d’un administrateur Windows, justement l’avantage est que leur nombre est très inférieur. C’est ce que je constate chaque jour sur le terrain», poursuit le responsable.

«Par ailleurs, j’aurais bien voulu que l’étude prenne en compte les coûts induits par la non-qualité des programmes Microsoft. Combien coûtent les faiblesses de sécurité, les interruptions de service ou les pertes de données? J’aurais aimé que l’on compare la robustesse et la stabilité d’un OS GNU/Linux face à Windows 2000.»

Enfin, pour le responsable d’Idealx, l’angle même de l’étude est tendancieux. «L’étude retient comme critère de comparaison celui du prix, qui est l’élément le moins significatif», assure Nathanaël Makarévitch. «En fait ce que j’observe, c’est qu’il n’y a pas d’économie majeure sur l’achat d’un serveur Linux par rapport à celui d’une machine Windows. En revanche sur le plan stratégique, avec une solution GNU/Linux et plus largement « open source », une entreprise n’est pas otage d’un éditeur, comme c’est le cas avec Windows», poursuit le responsable.

«Les nouvelles fonctions ou les corrections des bugs sont les mêmes pour tous les clients de Microsoft. Or, l’éditeur de Windows répond avant tout aux besoins de ses plus gros clients, ce qui ne convient pas forcément aux autres. GNU/Linux offre une plus grande liberté d’action», conclut Nathanaël Makarévitch.

Et déjà les adeptes du logiciel libre sortent eux aussi de leurs chapeaux, deux autres « études » aux conclusions contraires. Dans la première de juillet 2002 (en anglais au format PDF
), là aussi le nom du « sponsor » peut traduire une certaine orientation, car il s’agit d’IBM, converti au monde GNU/Linux depuis longtemps; dans la la seconde étude
, menée par le cabinet de conseil australien Cybersource, la conclusion affirmait que le coût d’achat et de maintenance d’une solution Linux, comparé à une solution Microsoft, est de 25% à 35% inférieure.

[source – ZDNet.fr]