Jacques Chirac a salué ce jeudi, « loin des polémiques et des passions », la mémoire des soldats tués en Afrique du Nord entre 1952 et 1962, à l’occasion de l’inauguration du Mémorial national de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie.
Le chef de l’Etat a rendu un hommage tout particulier aux harkis, supplétifs de l’armée française durant la guerre d’Algérie (1954-62) qui ont « payé un très lourd tribut », et a affirmé que leurs enfants devaient « trouver toute leur place dans notre pays ».
« C’est autour de ces soldats de toutes armées et de toutes armes que nous nous recueillons, loin des polémiques et des passions. Tous sont unis dans notre souvenir », a-t-il déclaré.
« Tous ont leur place dans le cortège glorieux des fils de France qui se sont illustrés sur tous les continents et ont servi notre pays aux heures les plus tragiques de notre histoire », a-t-il souligné.
Le chef de l’Etat a dévoilé le Mémorial, trois colonnes de près de six mètres, sur lesquelles un afficheur électronique – bleu, blanc, rouge – fait défiler, par ordre alphabétique et année par année, les noms de 22.959 soldats, dont 3.010 harkis, tués entre 1952 et 1962.
Cette liste, provisoire, pourra être complétée grâce au système informatique.
Le monument, dont l’édification avait été décidée en 1998, est situé sur la promenade piétonne du quai Branly, dans le VIIe arrondissement de Paris, en surplomb de la Seine.
Devant plusieurs centaines d’anciens combattants rassemblés sous la pluie, Jacques Chirac a décoré une dizaine d’entre eux en présence de Jean-Pierre Raffarin, Michèle Alliot-Marie, ministre de la Défense, et Hamlaoui Mekachera, secrétaire d’Etat aux Anciens combattants.
« Aujourd’hui, au nom de tous les Français, je veux rendre l’hommage de la Nation aux soldats morts pour la France en Afrique du Nord il y a presque un demi-siècle », a-t-il dit.
Ce monument, a-t-il poursuivi, « signifie que les soldats d’Afrique du Nord occupent enfin, comme leur aînés de 1914 et 1940, la place qui leur revient dans la mémoire de notre patrie ».
« DE PROFONDS STIGMATES »
« Quarante ans après la fin de la guerre d’Algérie, après ces déchirements terribles, au terme desquels les pays d’Afrique du Nord se sont séparés de la France, notre République doit assumer pleinement son devoir de mémoire », a-t-il souligné, en cette année de célébration du 40e anniversaire de la fin du conflit algérien, marquée le 19 mars 1962 par les accords d’Evian.
Le chef de l’Etat a ainsi évoqué, « à côté de ces noms de valeureux que nous arrachons à l’oubli », les soldats inconnus de la guerre d’Algérie, notamment les harkis restés en Algérie après le cessez-le-feu et exécutés pour beaucoup par l’Armée de libération nationale (ALN) une fois l’indépendance acquise en juillet 1962.
Leurs noms ne figurent pas sur le monument.
Jacques Chirac, qui a combattu en Algérie avec le grade de sous-lieutenant, a évoqué « l’expérience de la souffrance, de la mort, de la haine » dans le djebel algérien, contre « un ennemi imprévisible, insaisissable ». Mais aussi le malaise, qui perdure aujourd’hui, face à une « sale guerre » qui n’osait pas dire son nom.
« De retour en France, beaucoup, qui avaient servi avec honneur, ont porté seuls le poids de cette guerre dont on ne parlait pas, et qui a laissé de profonds stigmates dans notre mémoire nationale », a affirmé le président de la République.
Jacques Chirac et son Premier ministre de l’époque, Lionel Jospin, n’avaient pas participé aux cérémonies du 19 mars dernier.
Une polémique subsiste en effet sur la date de commémoration de la fin de la guerre d’Algérie.
Hamlaoui Mekachera a nommé une commission consultative chargée de choisir une date pour la future journée de commémoration nationale, sous la présidence de l’historien Jean Favier.
La commission s’est réunie pour la première fois le 6 novembre dernier.
Si la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie est favorable au choix du 19 mars, cette idée est très controversée et d’autres proposent le 16 octobre, date à laquelle fut inhumé en 1977 le soldat inconnu de la guerre d’Algérie.
[source – yahoo.com]