Une vague noire et verte de pèlerins chiites submerge Kerbala

Une vague noire et verte de pèlerins chiites submerge Kerbala

Une marée humaine converge sur la ville sainte de Kerbala, dans le centre de l’Irak, à l’occasion du pèlerinage du martyre de l’imam Hussein vénéré par la majorité chiite opprimée sous le régime de Saddam Hussein.

C’est la première fois depuis des décennies que cet événement, point culminant du calendrier chiite, se déroule aussi librement et ouvertement, selon les rites d’auto-flagellation interdits par le « raïs » déchu.
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La participation du clergé chiite venant de tout l’Irak confère au rassemblement une dimension politique, les chiites, qui représentent 60% de la population du pays, cherchant se placer pour la course au pouvoir.

Le pèlerinage dit de l' »Arbaïn », qui correspond au 40e jour de deuil après la mort d’Hussein, décapité à Kerbala par les troupes ommeyyades, se déroule aussi sous l’oeil neutre, mais vigilant, des forces anglo-américaines restées en Irak depuis le renversement, le 9 avril, du régime de Saddam Hussein.

Ce dernier, un membre du « clan des Tikritis » de confession sunnite, a toujours maltraité les chiites même si son régime était officiellement laïc. Lors de la dernière grande célébration de l' »Arbaïn » en 1977, les forces de sécurité avaient massacré des pèlerins chiites se rendant à Kerbala.

Dans cette ville sainte de 150.000 habitants située à 110 km au sud de Bagdad, la circulation automobile est paralysée par le flot de pèlerins dont beaucoup ont le visage et la poitrine en sang à force de se flageller en invoquant le nom du « prince des martyrs » et petit-fils du Prophète Mahomet.

AMERICAINS INVISIBLES EN VILLE

Les dirigeants chiites escomptent la venue d’un million ou plus de fidèles. Le cortège comprend des hommes en longue gallabiehs blanches portant des banderoles sur lesquelles on peut notamment lire: « La révolution de l’imam Hussein était un cri à la face des oppresseurs ! ».

Certains, ceints de bandeaux verts, brandissent des drapeaux noirs, symbole du deuil et du chiisme, verts, couleur de l’islam, et rouge, couleur du sang des martyrs. On remarque quelques femmes, toutes enveloppées de noirs, qui se frappent la poitrine lentement. Beaucoup ont gagné Kerbala nu-pieds sur des routes poussiéreuses écrasées de chaleur.


La procession est escortée de nombreux vendeurs à la sauvette, qui proposent des boissons gazeuses.

Le but final du pèlerinage est d’atteindre, dans une cohue indescriptible, le dôme en or du sanctuaire de l’imam Hussein, lui-même entouré par une foule brandissant son portrait.

Abdul Satar, un pèlerin, résume l’ambiance: « On peut maintenant oublier Saddam Hussein. Nos pensées vont au seul immam Hussein, que nous aimons tous ! ».

Nombre de fidèles brandissent aussi des portraits d’Ali, le premier imam du chiisme et le quatrième calife de l’islam. Le tombeau du gendre de Mahomet et du père de Hussein se trouve dans l’autre ville sainte voisine de Nadjaf.

Beaucoup de chiites, qui se considèrent comme les laissés-pour-compte de l’ancien régime, n’apprécient guère aujourd’hui « l’activisme » des Etats-Unis en Irak et protestent notamment contre l’arrestation d’un de leurs chefs de file, Muhammad al-Fartusi.

A Kerbala, les forces américaines sont invisibles dans le centre-ville, se contentent de stationner à la périphérie. « C’est un message aux Américains: en cas d’ingérence, nous vous combattrons », prévient un pèlerin.

[source – yahoo.com] Saul Hudson et Christine Hauser