Cinq jours après l’évasion de Borgo, en Corse, un commando a attaqué à l’arme lourde mercredi matin le centre pénitentiaire de Fresnes et fait évader Antonio Ferrara, un détenu fiché au grand banditisme.
Trois hommes au moins ont mitraillé les miradors, dynamité la première porte d’accès de la prison, fait sauter au lance-roquettes une deuxième porte et au plastic la grille de la fenêtre de la cellule d’Antonio Ferrara, 29 ans.
L’évadé, d’origine italienne, est un proche de Joseph Menconi, qui a lui-même réussi à s’échapper vendredi de la prison de Borgo (Haute-Corse) avec l’aide d’un commando qui disposait, lui, d’armes factices.
La spectaculaire évasion de Fresnes, avec des armes de guerre, a suscité une vive émotion des syndicats pénitentiaires, qui réclament un renforcement des mesures de sécurité, et de certains syndicats de police.
Le ministre de la Justice, Dominique Perben, a aussitôt confirmé qu’il réunirait comme prévu vendredi matin « l’ensemble des directeurs régionaux » afin de discuter de l’amélioration de la sécurité des prisons.
Le garde des Sceaux, qui avait annoncé il y a six mois un plan de sécurisation dont les syndicats disent ne pas voir les effets, a souligné qu’il s’efforcerait « d’adapter le dispositif » à ce nouveau type d’évasions.
« Nous avons affaire à une évasion de type militaire avec une utilisation d’armes de guerre et des gens qui prennent le maximum de risques », a-t-il souligné.
Il a constaté en se rendant à Fresnes que les miradors étaient « criblés de balles de gros calibre ».
« Nous avons affaire à des gens qui fonctionnent avec de tels moyens et en prenant de tels risques qu’il est bien difficile pour le personnel pénitentiaire de faire face », a-t-il admis.
Pour Pierre Bédier, secrétaire d’Etat aux programmes immobiliers de la justice, « l’extrême violence » de l’évasion de Fresnes s’explique par la « sécurisation accrue » des établissements pénitentiaires.
« L’extrême violence a empêché la réaction. On est parfaitement conscients que ça tient d’abord à une chose: c’est que la sécurisation accrue, paradoxalement, oblige ces grands bandits à utiliser des méthodes plus violentes », a-t-il déclaré à l’issue du conseil des ministres.
« Lorsque vous comparez 2001 et 2002, nous avons divisé par deux le nombre d’évasions. Donc, ces évasions sont plus violentes parce qu’il est plus difficile de s’évader. Les prisons que nous allons construire vont être à l’abri de ce type d’attaque », a-t-il assuré.
« EXTREME VIOLENCE »
Un avis que ne partagent pas les syndicats de gardiens.
Le syndicat UFAP (Union fédérale autonome pénitentiaire) de la prison de Fresnes a ainsi réclamé la démission du directeur de l’administration pénitentiaire.
« La Chancellerie et la DAP (direction de l’administration pénitentiaire) sont complices de cette évasion réussie, car comment comprendre qu’un détenu comme Ferrara soit laissé libre de préparer son évasion ? », a-t-il déclaré dans un communiqué.
Pour l’UFAP, le récent rapport commandé par Dominique Perben en vue de son plan de sécurisation « n’est qu’une vaste fumisterie ».
L’Unsa-Police pense que cette nouvelle affaire démontre l’urgence de s’attaquer au trafic d’armes sur le territoire et le syndicat appelle les citoyens à « faire acte de civisme » en signalant à la police les détenteurs d’armes dangereuses.
L’évasion de Ferrara semble avoir été préparée avec minutie. Selon les syndicats, le détenu avait provoqué lundi un incident afin de se retrouver dans le quartier disciplinaire, plus proche de la sortie.
De plus, les gardiens ont retrouvé « dans sa cour de promenade » un téléphone portable avec lequel il a certainement communiqué avec ses complices.
Une fois dans la prison, « le commando est entré dans le quartier disciplinaire et a fourni à Antonio Ferrara des explosifs qui lui ont permis de faire sauter les barreaux de la fenêtre de sa cellule », a expliqué à Reuters Christophe Marques, du syndicat FO.
Les membres du commando, vêtus d’uniformes de policiers, ont mitraillé les miradors à quatre reprises avec un ou plusieurs fusils d’assaut.
« Tous ces événements se sont déroulés en un temps record, dix minutes », a souligné le syndicaliste.
Le commando a ensuite pris la fuite à bord d’une voiture vraisemblablement volée après avoir incendié des automobiles en stationnement devant la prison. Aucun blessé n’est cependant à déplorer.
Antonio Ferrara est soupçonné par les enquêteurs d’avoir participé ces dernières années à de nombreuses attaques spectaculaires contre des fourgons blindés.
Il s’agit de la troisième évasion répertoriée depuis le début de l’année.
Pour ajouter à la confusion, deux autres malfaiteurs, Laurent Soltani et Rachid Bekhaled, soupçonnés d’avoir mené de nombreuses attaques à main armée, se sont évadés des locaux de la police judiciaire de Nanterre mardi en début de soirée.
Laurent Soltani a été cependant repris par les forces de l’ordre, a-t-on précisé de source policière.
[source – yahoo.com]