La juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a rejeté vendredi la demande de Bertrand Cantat visant à suspendre la diffusion du livre de Nadine Trintignant « Ma fille, Marie », jugé attentatoire à la présomption d’innocence par le chanteur de Noir Désir.
La juge des référés, Catherine Bezio, a estimé que l’emploi, à 85 reprises, du terme « meurtrier » pour désigner Bertrand Cantat, soupçonné d’avoir provoqué la mort de sa compagne l’actrice Marie Trintignant, « ne saurait suffire à emporter la conviction du lecteur ». Le fait pour Nadine Trintignant de désigner Bertrand Cantat uniquement par le terme meurtrier « frappe surtout le lecteur par sa forme incantatoire et sa finalité cathartique, qui traduisent seulement comme évidente la douleur d’une mère anéantie par la perte tragique de son enfant », écrit la juge dans son ordonnance.
L’avocat de Bertrand Cantat, Me Olivier Metzner, a indiqué qu’il allait immédiatement faire appel de cette « mauvaise décision ». L’audience devant la cour d’appel devrait se dérouler lundi. « La justice française accepte que l’on puisse traiter quelqu’un de meurtrier ou d’assassin alors qu’il n’a pas été jugé. Dés lors que l’on peut dire publiquement que Bertrand Cantat est un meurtrier ou un assassin, alors, non, ce dernier ne peut être jugé sereinement », a estimé Me Metzner.
La décision de la juge des référés est conforme à l’avis du parquet qui s’est prononcé lors de l’audience vendredi matin contre la suspension de l’ouvrage, estimant que celui-ci ne constituait « pas une atteinte intolérable » à la présomption d’innocence de Bertrand Cantat. La représentante du parquet a estimé que le livre de Nadine Trintignant était l’expression « de la douleur d’une mère frappée d’un incommensurable chagrin » tout en reconnaissant que « Bertrand Cantat est légitime à faire valoir qu’être présenté comme un meurtrier, c’est être présenté comme coupable ».
L’avocat de la famille Trintignant, Me Georges Kiejman, a précisé que la mention « assassin », qui figure à deux reprises dans l’ouvrage, allait être supprimée dans un nouveau tirage de 20.000 exemplaires du livre. L’audience devant le juge des référés a donné lieu à une répétition générale du procès à venir de Bertrand Cantat: les avocats des parties, deux ténors du barreau, se sont livrés à une véritable plaidoirie sur le fond du dossier, transformant la salle des référés en cour d’assises.
« Est-ce qu’un lecteur ayant lu 85 fois le mot meurtrier peut refermer le livre en se disant que Cantat est innocent. C’est pire que l’image subliminale: on imprime, on incruste, on impose une vision d’une vérité », a lancé Me Metzner. « Je défends les intérêts d’un homme désespéré car il se sent responsable de la disparition de celle qu’il aimait », a-t-il ajouté.
Vient le tour de Me Kiejman, imperturbable durant l’intervention émaillée de piques de son confrère Olivier Metzner: l’avocat de la famille Trintignant, regrettant que la plaidoirie adverse déborde du cadre du référé, s’engouffre sur le même terrain. « Ce qui est grave pour Bertrand Cantat, c’est son attitude ambiguë, odieuse, de le voir adopter cette attitude pragmatique qui consiste à adapter sa défense au fur et à mesure de l’enquête », déclare-t-il en préambule.
« Bertrand Cantat est un menteur comme les autres, un menteur de droit commun (…) Vous ne voulez pas entendre +meurtrier+. Quel mot voulez-vous entendre? Bourreau? Massacreur? Votre mot sera le nôtre! », lance-t-il à l’adresse de la partie adverse.
[source – yahoo.com]