Les combats se poursuivent dans plusieurs secteurs de Bagdad au lendemain de l’entrée des chars américains dans le centre de la capitale irakienne.
Dans le nord de l’Irak, les combattants kurdes ont en grande partie pris le contrôle de la ville stratégique de Kirkouk tandis que des chars américains ont pris la direction de Mossoul, troisième ville du pays.
Malgré le renversement symbolique d’une statue de Saddam Hussein devant les caméras de télévision en plein coeur de Bagdad la veille, les autorités américaines et britanniques ont souligné jeudi que de nouveaux combats étaient à attendre, non seulement dans la capitale irakienne mais également dans le Nord, où les forces fidèles au président irakien semblent se rassembler autour de Tikrit et Mossoul.
A Bagdad, des avions de chasse américains ont attaqué des positions tenues par des groupes de volontaires arabes dans le quartier d’Al Mansour, à proximité du QG de la police secrète, sur la rive occidentale du Tigre.
Ces combattants y ont érigé des barrages et patrouillaient dans les rues de deux autres quartiers, Aadhamia et Ouaziria. Les troupes au sol américaines, qui semblent s’être retirées de plusieurs quartiers qu’elles occupaient mercredi, étaient invisibles, de même que les forces irakiennes.
VIOLENTS COMBATS AUTOUR D’UNE MOSQUEE
Au 22e jour de guerre, un Marine a été tué et plus de 20 autres ont été blessés dans de violents affrontements autour de la mosquée Imam al Adham située dans le centre-nord de Bagdad, a annoncé l’armée américaine.
« Nous disposions d’une information selon laquelle des membres de la direction du régime essayaient d’organiser (…) une réunion. Les combats dans et autour du complexe de la mosquée n’ont pu être évités car les forces ennemies tiraient à partir de cette zone », a déclaré la capitaine Frank Thorp, porte-parole du commandement central américain basé au Qatar.
A l’aéroport international de Bagdad, le commandant Rod Legowski, de la Ière division de Marines, a dit ne pas savoir si Saddam Hussein se trouvait dans le secteur de la mosquée. Mais les Marines ont visé des cibles d’une « valeur militaire certaine », a-t-il ajouté, précisant que les combats avaient duré plus de quatre heures.
Les combats sont terminés mais les soldats américains sont « toujours en train de nettoyer le chantier », a-t-il affirmé.
Pendant la nuit, les Marines ont occupé le quartier chiite de Saddam City, dans le nord-est de la capitale, non sans résistance. Des tirs d’artillerie, de mortier et de mitrailleuse ont été signalés. Des batteries de DCA irakienne ont également tiré sur des appareils américains. A l’aube cependant, seules quelques rafales de mitrailleuses ont été entendues.
LES KURDES DANS KIRKOUK
Dans le Nord, des centaines de combattants kurdes de l’UPK (Union patriotique du Kurdistan) ont pénétré en nombre dans le centre pétrolier stratégique de Kirkouk, abandonné par les forces gouvernementales, rapporte Mike Collett-White envoyé spécial de Reuters dans cette région.
Un commandant « peshmerga », Mam Rostam, lui a ensuite affirmé à que la ville, bombardée dans la matinée par des B-52 américains, était désormais « contrôlée » par les combattants kurdes, mais la Turquie a immédiatement fait savoir qu’elle n’accepterait pas de présence permanente des Kurdes à Kirkouk, où elle enverra bientôt des « observateurs » militaires.
Des habitants sortant de la ville ont indiqué que les soldats irakiens avaient soit déposé les armes soit fui plus au Sud vers Tikrit, la ville natale de Saddam Hussein où se regrouperaient des éléments de la garde républicaine, d’après l’armée américaine qui a pilonné la ville dans la matinée.
D’après un journaliste de Reuters, des chars américains ont pénétré jeudi dans Arbil, la principale ville du Kurdistan autonome. C’est la première fois que les blindés américains sont aperçus aussi près de la ligne de front du nord de l’Irak.
Plus à l’est, près de la frontière syrienne, les forces américaines ont indiqué qu’elles étaient en train de s’emparer de la ville de Kaïm.
En dépit de cette ambiance de fin de règne, les autorités américaines se sont gardées de tout triomphalisme.
Le capitaine Thorpe a ainsi estimé que « l’objectif de renversement du régime n’a toujours pas été atteint » et que « de violentes batailles (étaient) à venir » car la résistance irakienne se poursuit.
POLEMIQUES SUR L’APRES-CONFLIT
Même tonalité à Londres où le ministre de la Défense, Geoff Hoon, a mis en garde contre tout « excès d’optimisme » quant au temps nécessaire aux forces américaines et britanniques pour contrôler l’Irak. « Nous devons encore nous attendre à de violents combats », a-t-il prédit.
La guerre n’est pas terminée, d’après Washington et Londres, mais des polémiques sur l’après-conflit se font déjà jour.
Chef de file d’un « camp de la paix » quelque peu destabilisé par le déroulement de l’offensive anglo-américaine en Irak, Jacques Chirac s’est réjoui jeudi « de la chute de la dictature de Saddam Hussein » mais a appelé à l’acheminement « sans délai » de l’aide humanitaire.
L’Allemagne, par la voix du chancelier Gerhard Schröder, s’est dite prête à contribuer à la reconstruction de l’Irak à condition que la gestion en soit confiée aux Nations unies.
Au Caire, le président égyptien Hosni Moubarak a souhaité que les Irakiens puissent dès que possible prendre en mains l’administration de leur pays, après l’effondrement du régime de Saddam Hussein.
A Bagdad même, à la liesse suscitée dans la capitale par la destruction de la statue du raïs ont succédé des interrogations des Bagdadis sur leur avenir face à une situation chaotique.
Dans un entretien diffusé par CNN, Ahmad Chalabi, dirigeant du Congrès national irakien, une alliance d’opposition soutenue par Washington, s’en est même pris aux futurs administrateurs américains pour leur reprocher ce qu’il qualifie de lenteurs dans l’acheminement de l’aide humanitaire et logistique.
Au Koweït, le porte-parole du Bureau de reconstruction et d’assistance humanitaire, organisation de Washington qui devrait prendre les rênes du pays dans un premier temps, a souligné que le début de ses travaux dépendrait de l’évolution de la situation en termes de sécurité.
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a annoncé jeudi la reprise de ses opérations dans la capitale, suspendues la veille.
[source – yahoo.com]