La fusée Ariane-5 est de nouveau dans l’espace après avoir été immobilisée pendant quatre mois, à la suite de l’échec de la première « Ariane dix tonnes », mais l’avenir du seul lanceur européen désormais, après le tir de la dernière Ariane-4, le 15 février, n’est pas assuré pour autant.
Pour son premier lancement de l’année, Ariane-5 a parfaitement rempli sa mission et placé sur orbite, comme prévu, ses deux passagers, deux satellites de télécommunications, l’un indien, INSAT-3A, l’autre américain, Galaxy-XII, le premier pour le compte de l’Organisation Indienne de Recherche Spatiale (ISRO), le second pour celui du premier opérateur mondial (américain), PanAmSat.
Initialement programmé pour mardi soir, ce vol a seulement connu une petite anicroche, un report de vingt-quatre heures, pour permettre à l’un des deux clients, l’ISRO, de vérifier des liaisons électriques avec son satellite.
Après l’échec du premier tir de la version plus puissante du lanceur, Ariane-5 ECA, capable de placer sur orbite deux satellites géostationnaires d’une masse totale de dix tonnes, contre 5,9 pour l’Ariane-5 Générique, ce tir était attendu avec une certaine inquiétude. Si l’on peut être désormais rassuré sur la fiabilité de cette version du lanceur, de grosses incertitudes planent toutefois tant sur l’avenir de la famille Ariane-5 que sur Arianespace.
Le 11 décembre, la première Ariane-5 ECA avait dû être détruite, à la suite à d’une défaillance de la tuyère du nouveau moteur Vulcain-II de son premier étage, qui lui avaient fait prendre une mauvaise trajectoire. Cet échec a conduit à une suspension de tous les vols d’Ariane-5, afin de procéder à une révision complète des « procédures de qualification » de l’ensemble de la famille de lanceurs. Le doute sur la fiabilité des Ariane-5 en général s’installait.
Si les modifications des éléments responsables de l’échec d’Ariane-5 ECA sont en cours, ce modèle plus puissant devrait être prêt à voler de nouveau seulement l’an prochain, a confirmé jeudi le directeur général d’Arianespace, Jean-Yves Le Gall. Par ailleurs, à la demande de la clientèle, il devra réussir deux tirs d’essai avant d’être commercialisé.
Dans un marché déprimé (une quinzaine de lancements commerciaux dans le monde en 2002, contre vingt-cinq en 2001), et alors qu’elle va devoir affronter la concurrence des nouvelles fusées américaines Delta-4 et Atlas-V, la société de gestion et de commercialisation des lanceurs européens ne dispose donc plus actuellement que d’Ariane-5 Générique. Or, son choix d’effectuer des lancements doubles, même si la taille des satellites a cessé de croître, lui impose de disposer rapidement d’une Ariane-5 ECA fiable.
Pour le numéro un mondial du transport spatial commercial, ces problèmes viennent amplifier ses difficultés financières. Aussi, Arianespace, qui a connu 193 millions d’euros de pertes en 2001 et quelques 400 millions en 2002, réclame-t-elle à ses actionnaires (44 sociétés, dont EADS, l’ESA et le CNES), a-t-on appris mercredi auprès de la société, un peu plus d’un milliard d’euros pour assurer la survie du « système Ariane » : 555 millions d’euros pour le retour d’Ariane-5 ECA, 200 millions par an pour le soutien à l’exploitation, 200 millions pour une augmentation de capital et 50 millions pour maintenir un certain temps en parallèle Ariane-5 Générique et Ariane-5 ECA. C’est notamment avec ce soutien à l’exploitation que la dernière version d’Ariane-5 pourrait être « viable économiquement » à partir de 2005, estime Arianespace. Cette année-là serait alors celle de la « renaissance ».
C’est de ces questions, donc de l’avenir d’Ariane et d’Arianespace, que les ministres européens de l’Espace débattront lors de leur conférence, prévue le 27 mai à Paris.
[source – yahoo.com]