Malgré une tempête de sable qui ralentit certaines opérations, les forces américano-britanniques ont continué à pilonner mardi les positions de la Garde républicaine au sud de Bagdad avec pour objectif, selon une source militaire britannique, de prendre vite position non loin de la capitale et de marquer une pause.
Poursuivant son objectif d’être le plus rapidement possible à Bagdad, pour couper le « cerveau » de l’Irak du reste du pays, les troupes anglo-américaines concentrent leurs efforts aériens sur les positions de la Garde républicaine (corps d’élite de Saddam Hussein), notamment dans la région de Kerbala, à 95 km de Bagdad, mais aussi dans la périphérie de la capitale où des casernes de la Garde ont été de nouveau prises pour cibles.
Mille quatre cents sorties aériennes étaient prévues pour la seule journée de mardi, notamment contre la Garde républicaine, a déclaré le général américain Victor Renuart au Qatar.
Bien plus au sud de Bagdad, au niveau de Nassiriah, les forces américaines ont réussi à atteindre les ponts sur l’Euphrate et le canal Saddam, laissant la ville aux mains des Irakiens, mais peu après, elles se sont heurtées à une résistance.
« Nous sommes en ce moment en pleine embuscade », a déclaré le commandant du 3e bataillon du 1er régiment d’infanterie des Marines, sur la route au nord de Nassiriah, ville de 250.000 habitants. C’est non loin de là que deux cars irakiens ont été anéantis, avec à leur bord une trentaine de personnes tuées, qui venaient semble-t-il renforcer les unités irakiennes.
Plus au sud encore, le port en eau profonde d’Oum Kasr, par où pourra débarquer l’ aide humanitaire, est désormais entièrement sous le contrôle des forces américano-britanniques.
En revanche, Bassorah, qui compte plus d’un million d’habitants, est toujours aux mains des Irakiens, et la coalition ne veut pas l’assiéger, même si elle compte prendre pour cible certains objectifs militaires de la seconde ville d’Irak, menacée d’une crise humanitaire grave.
A l’Onu, le secrétaire général Kofi Annan a plaidé pour une résolution de la crise humanitaire, car « une ville de cette taille ne peut se permettre de vivre longtemps sans électricité et sans eau ».
Si Tony Blair a pu estimer mardi que la progression vers Bagdad se déroulait conformément au plan, à Washington le chef d’état-major interarmes américain, le général d’aviation Richard Myers, a tempéré en estimant que « les plus violents combats sont devant nous ». Au même moment, un porte-parole militaire irakien a clamé que « leurs rêves (des Anglo-américains) d’une guerre courte et facile commencent à se dissiper et leurs espoirs de battre le peuple irakien tombent en poussière ».
Les Irakiens ont trouvé mardi en la météo un allié précieux. La tempête de sable qui s’est levée, et qui selon les officiers américains pourrait durer 60 heures, « a eu un impact sur le champ de bataille », a reconnu le général Renuart, de l’état-major américain.
APPEL AUX TRIBUS À RÉSISTER PAR LA GUÉRILLA
Le vent et la poussière réduisent fortement la visibilité, gênant l’atterrissage des hélicoptères, aggravant le risque d’accidents entre véhicules américains, au point que certains convois, notamment dans la région de Najaf, à 160 km au sud de Bagdad, ont été immobilisés, a rapporté un journaliste de Reuters. « La visibilité est réduite à cinq mètres », a-t-il dit, à un endroit où une quarantaine de camions chargés de munitions, et vivres et de carburant était contraint à l’arrêt.
Le numéro un irakien Saddam Hussein a lancé un appel aux tribus de bédouins pour qu’elles n’hésitent pas, sans ordre de l’armée, à livrer une lutte de guérilla contre l’armée d’invasion. Un autre dirigeant irakien, le vice-président Taha Yassine Ramadan, a appelé le monde arabe à faire plus pour tenter d’empêcher la poursuite de la guerre. Il suggère aux pays arabes de couper le robinet du pétrole aux pays occidentaux belligérants et d’interdire leur espace aérien et leurs eaux territoriales aux forces américano-britanniques.
La foule arabe, elle, continue de protester contre la guerre, plus ou moins avec la bénédiction de ses dirigeants. Ainsi, à Damas, des centaines de milliers de Syriens ont manifesté pour réclamer l’arrêt immédiat des combats. George Bush y a été traité de « porc » et Tony Blair de « laquais ». D’autres manifestations ont eu lieu à Amman, en Jordanie, ainsi qu’au Liban, où des milliers de Libanais et de Palestiniens ont défilé dans le centre de Beyrouth, à l’appel aussi bien de la Phalange chrétienne que du Hezbollah chiite. On manifestait aussi mardi à Tunis, ainsi qu’à Tripoli en Libye.
Sur le flanc nord de l’Irak, aucun mouvement de troupes notable n’a été signalé dans les rangs kurdes. A l’issue de nouvelles négociations tenues mardi à Ankara, les Etats-Unis ne semblent toujours pas parvenus à dissuader la Turquie d’envoyer des troupes dans le Nord irakien. Les discussions doivent se poursuivre dans les jours à venir, mais, d’ores et déjà, à Washington, George Bush a annoncé que la Turquie recevrait 8,5 milliards de dollars sous forme de prêts directs ou de garanties de prêts – ce qui reste loin du total prévu si la Turquie avait autorisé le déploiement de troupes américaines sur son sol.
Enfin, pour la première fois depuis le déclenchement du conflit, Tony Blair et George Bush doivent se rencontrer, mercredi à Camp David. Blair rencontrera en outre Kofi Annan jeudi à New York.
Bush a estimé mardi qu’il était urgent que le Congrès vote le financement de la guerre. La veille, il avait fait savoir qu’il demanderait une rallonge budgétaire de près de 75 milliards de dollars.
[source – yahoo.com]