L’Irak a remis aux Nations unies un dossier de plus de 11.000 pages décrivant ses programmes militaires, dont il affirme qu’ils sont dénués de toutes armes interdites.
Le président Saddam Hussein a choisi en outre ce moment symbolique pour présenter ses excuses pour l’invasion du Koweït, en 1990, tout en exhortant le peuple de l’émirat à rejoindre les Irakiens dans leur lutte contre les armées « d’infidèles » occidentaux.
La presse internationale n’a pas eu accès au dossier. Quant au président George Bush, il a de nouveau exigé un inventaire « crédible, précis et complet ».
Le Directorat de la surveillance nationale a présenté les éléments du dossier avant de les transmettre aux inspecteurs en désarmement de l’Onu présents à Bagdad, ont confirmé ces derniers qui en ont accusé réception.
« La déclaration sera transmise rapidement au siège de l’Onu à New York et à celui de l’Agence internationale à l’énergie atomique à Vienne », a déclaré dans un communiqué Hiro Uekin, porte-parole des équipes d’inspecteurs à Bagdad.
Selon un avis placardé au siège du Directorat, l’inventaire irakien comporte 11.807 pages ainsi que 357 pages d’annexes et des CD-Roms totalisant 529 mégaoctets de données.
La déclaration d’armements irakienne est communiquée à l’Onu un mois après l’adoption de la résolution 1441 des Nations unies, qui somme Bagdad de désarmer sous peine de « graves conséquences » pouvant prendre la forme d’une attaque américaine.
« Nous déclarons que l’Irak est dénué d’armes de destruction massive », a déclaré Hussam Mohammed Amine, chef du Directorat. « Cette déclaration fait état de quelques activités à double usage », a-t-il ajouté, faisant ainsi allusion à des technologies qui peuvent se prêter à des utilisations civiles et militaires.
« Si les Etats-Unis ont un minimum d’honnêteté et de courage, ils devraient accepter ce rapport. »
La résolution 1441 donnait à l’Irak jusqu’au dimanche 8 décembre pour présenter un inventaire complet de ses programmes passés ou présents relatifs à des armes biologiques, chimiques ou nucléaires.
« NOUS DEMANDONS PARDON A DIEU »
Alors même que le document était remis aux inspecteurs de l’Onu, Saddam Hussein a adressé ses excuses au peuple koweitien pour l’invasion et l’occupation de l’émirat en 1990-91.
« Nous demandons pardon à Dieu pour tout acte ayant soulevé sa colère dans le passé, que nous avons pu méconnaître et qui nous est attribué, et dans cet esprit, nous vous présentons également nos excuses », déclare le « raïs » irakien dans une lettre aux Koweitiens lue à la télévision par le ministre de l’Information Mohammed Saïd el Sahaf.
« Pourquoi les combattants fidèles et dévoués du Koweït ne rencontreraient-ils pas leurs homologues irakiens sous la protection de leur créateur, plutôt que sous celle de Londres, de Washington ou de l’entité sioniste, pour discuter de leurs affaires en commençant par le djihad (lutte sacrée) contre l’occupation d’armées infidèles », ajoute le président.
Au siège du Directorat, dans le centre de Bagdad, un journaliste de Reuters a pu voir des documents classés dans deux douzaines de dossiers placés sur une table à côté de CD-Roms dorés. Certains portaient la mention « Déclaration actuellement exacte et complète ».
La plupart semblaient rédigés en anglais et quelques autres en arabe. Les journalistes n’ont pas eu accès à leur contenu.
UN EXAMEN « A FOND »
Aux Etats-Unis, George W. Bush a déclaré samedi dans son allocution radiophonique hebdomadaire que Washington se donnerait « un certain temps » pour évaluer la déclaration irakienne et déterminer si Saddam Hussein répondait aux exigences de l’Onu en matière de désarmement.
« Nous ne jugerons l’honnêteté et le caractère exhaustif de la déclaration qu’après l’avoir examinée à fond, ce qui prendra un certain temps », a dit Bush. « Cette déclaration doit être crédible, exacte et complète, sans quoi le dictateur irakien aura une fois de plus démontré au monde qu’il a choisi de ne rien changer à son comportement. »
En Grande-Bretagne, le Premier ministre Tony Blair déclare espérer, dans un article publié par Al Hayat, que l’inventaire irakien sera complet et basé sur les faits, tout en restant sceptique au sujet de la coopération de Saddam Hussein avec les inspecteurs.
Le secrétaire américain à la Défense, Donald Rumsfeld, a déclaré pour sa part à la télévision libanaise LBC que le dirigeant irakien devrait s’efforcer d’éviter une guerre contre l’Irak en quittant son pays.
Selon les experts en armements, qui ont repris leurs inspections en Irak le mois dernier après quatre ans d’absence, Bagdad a coopéré de façon satisfaisante sur 20 sites suspects visités jusqu’ici. Des inspections ont eu lieu samedi dans deux centres de recherches nucléaires et militaires.
Les membres du Conseil de sécurité de l’Onu ont décidé de ne pas rendre public le contenu des documents irakiens avant une semaine pour permettre aux experts de déterminer d’abord s’ils ne contiennent pas de secrets militaires pouvant « intéresser » des parties extérieures en quête d’armes à effets massifs.
Les documents seront analysés par la Commission de contrôle, de vérification et d’inspection de l’Onu (Cocovinu) et l’AIEA. Selon des diplomates, une semaine pourrait s’écouler avant que les 15 membres du Conseil de sécurité puissent les consulter.
Les Etats-Unis pourraient, après avoir consulté les documents, accuser l’Irak de « violation substantielle » de ses obligations, ce qui rendrait possible une attaque contre Bagdad.
Mais la résolution 1441 précise que toute violation doit être vérifiée sur le terrain par les inspecteurs. En adoptant une résolution très contraignante, l’Onu a voulu s’assurer que Washington ne dénonce pas unilatéralement une infraction avant d’attaquer Bagdad en se prévalant du soutien de l’Onu.
Les inspecteurs de l’Onu doivent remettre un rapport au Conseil de sécurité le 26 janvier au plus tard. Ils peuvent signaler toute violation irakienne avant cette date.
[source – dslvalley.com]