Téléchargement : sept pirates pas vraiment

Dans sa lutte contre le téléchargement musical illégal, la RIAA (Recording industry association of America) est passée à la vitesse supérieure.

Le lobby américain des maisons de disques a décidé d’attaquer en justice 261 particuliers accusés d’avoir échangé plusieurs centaines de fichiers musicaux en ligne. Sur le papier, ces particuliers sont passibles d’amendes pouvant atteindre les 150 000 dollars par titre échangé.

Pour éviter de trop écorner son image, l’industrie du disque a néanmoins prévu un programme d’amnistie pour les particuliers qui reconnaissent les faits et qui s’engagent à supprimer les fichiers téléchargés illégalement. Reste qu’en attaquant en justice 261 particuliers de front, la RIAA se retrouve dans la position du soldat qui tire dans le noir. Les particuliers accusés de piratage par la RIAA sont les personnes clientes identifiées dans les contrats d’accès Internet des FAI. Or sous un même toit, ne résident pas que des amateurs de P2P.

Du coup, parmi les 261 procédures lancées, l’ubuesque côtoie le piratage parfois pur et dur. Morceaux choisis, avec sept pirates identifiés avec plus ou moins de bonheur par la RIAA :

Durwood Pickle, un paisible texan de 71 ans, a appris de la bouche d’un journaliste que l’industrie du disque lui intentait un procès pour avoir téléchargé de la musique sur son ordinateur. Après une petite enquête familiale, il s’est avéré que c’est le petit fils de Durwood Pickle qui profitait de ses visites familiales chez ses grands-parents pour télécharger de la musique.

Même phénomène pour Romana Torres, une autre retraitée, accusée par la RIAA d’avoir téléchargé des morceaux de Missy Elliot ou encore d’Enigma. Outre ses goûts musicaux modernes, Romana Torres bénéficie d’un don d’ubiquité : elle n’était pas aux Etats-Unis au cours de la période où les forfaits ont été commis. Elle se refuse néanmoins à dévoiler l’identité du coupable, sûrement membre de la famille.

Richard Warner, un marchand de vin californien qui ne possède pas d’adresse e-mail et qui indique ne pas savoir télécharger sur Internet, se retrouve lui aussi dans la liste des 261 pirates. La RIAA l’accuse d’avoir notamment downloadé des titres de Mariah Carey ou des Smashing Pumpkins. Le mystère est entier.

Chez la famille Lahara, installée à Chicago, on a découvert le génie maison. Brianna, âgée de douze ans, a patiemment construit sa discothèque avec l’aide de KaZaA. Selon le New York Post, la famille est tombée des nues devant la mise en accusation de la RIAA : quelques semaines auparavant, la mère avait acheté la version payante de KaZaA. Avec ce geste, la famille se croyait désormais dans la légalité. Finalement, la RIAA et les Lahara ont trouvé un arrangement à l’amiable avec le versement de 2 000 dollars en échange de l’abandon des poursuites.

Heather McGough, une jeune mère célibataire de 23 ans, est elle aussi tombée des nues face au courrier de la RIAA. « J’avais suivi l’affaire Napster, explique-t-elle dans le Washington Post, mais puisque la justice l’avait condamné à cesser ses activités, j’ai juste pensé que télécharger grâce à un logiciel toujours sur le Net n’était pas illégal ». Comme quoi, la pédagogie.

Finalement, parmi les 261 accusés, les pirates se font rares. Parmi eux Timothy Davies, un jeune internaute, qui a reconnu avoir téléchargé en connaissance de cause plus de 500 morceaux avant que son fournisseur d’accès ne le mette au courant de l’intérêt que lui portait l’industrie du disque.

Autre pirate identifié par la RIAA : Janet Bebell. Cette femme de cinquante-quatre ans vit au Colorado (20 des 261 personnes accusées par la RIAA sont issues de cet Etat). C’est son fils de vingt-deux ans qui téléchargeait de la musique en ligne (956 morceaux exactement). Elle a appris sa mise en accusation par le biais d’une lettre envoyée par son FAI COmcast. Janet Bebell prend cette affaire avec un certain sens de l’humour : « Je suis sûre que voir une femme d’un certain âge avec des cheveux poivre et sel devant se défendre au tribunal pour des accusations de téléchargement de musique portées par une société qui s’appelle Incubus, ça va en faire rire plus d’un », a-t-elle déclaré au quotidien The Denver Post. Cela est d’autant plus vrai que son fils a déménagé de chez en juillet et, en partant, a effacé l’ensemble des morceaux de musique enregistrés sur l’ordinateur de sa mère.

*(Nous avions précédemment évoqué le nom de Annalee Newitz. Il s’agit d’une journaliste américaine qui a rédigé un article titré « Why I Infrige » où elle explique les raisons pour lesquelles elle pirate de la musique en ligne. Cependant, cette personne ne fait pas l’objet de poursuites de la part de la RIAA).

[source – journaldunet.com]