Bientôt, les programmes audiovisuels passeront sur la paire de cuivre du téléphone aux côtés de la voix et de l’accès Internet. L’infrastructure technique est quasiment en place, le marché se dessine avec le succès de l’ADSL. Reste à définir le cadre réglementaire…
Convergence. Ce terme, à l’origine de bien des mutations et rabâché depuis de nombreuses années, pourrait bientôt trouver tout son sens aux yeux du consommateur avec l’arrivée de la télévision sur l’ADSL (TV ADSL).
« La télévision sur ADSL constitue une bonne illustration de la convergence des réseaux », estime Paul Champsaur, président de l’Autorité de régulation des télécoms (ART), qui s’exprimait à l’occasion d’un séminaire du cabinet d’études NPA Conseil organisé le 21 mars 2003 avec pour thème : « Télévision sur ADSL : simple réseau de distribution ou facteur de recomposition du marché ? ». Si, hier, la paire de cuivre de la prise téléphonique transportait de la voix, aujourd’hui elle véhicule du texte et de l’image via Internet.
Et demain, avec l’ADSL, des programmes audiovisuels. « Les premiers services commerciaux pourraient voir le jour très bientôt et en tout cas dès 2004 », avance Paul Champsaur.
Conditions techniques satisfaisantes
En effet, les solutions techniques sont sur le points d’être validées. Les débits offerts par l’ADSL, qui devraient progresser vers les 1 024 Kbits/s, s’avèrent suffisants pour transporter des fichiers vidéo toujours plus compressés à qualité égale, via notamment les codecs Windows Media 9 et DivX.
Les DSLAM (les répartiteurs qui filtrent les signaux voix et données) de dernière génération offrent des fonctions de duplication des programmes et optimisent la répartition de la charge sur le réseau. Et la diffusion en multicast économise la bande passante.
Des terminaux DSL/décodeurs relieront le poste de télévision à la prise téléphonique et permettront ainsi de se passer d’ordinateur, intermédiaire rebutant pour nombre de foyers.
Par ailleurs, plusieurs expériences en grandeur réelle sont en cours : DreamTV de TF1 avec l’opérateur LDCom ; PCCAD (pilotage de chargement de contenus à domicile) de France Télécom en partenariat avec… TF1 à partir de juin 2003 sur Lyon ; Monaco Telecom avec Alcatel, Fujitsu-Siemens et MovieSystem qui expérimentent un service connexe de vidéo à la demande (VOD).
D’un autre côté, le marché est en train de mûrir. Les accès ADSL ont explosé en 2002 pour atteindre plus d’1,4 million d’abonnés.
Et le gouvernement vise les 10 millions d’internautes haut débit pour 2007. Enfin, nombre d’industriels (Alcatel, France Télécom, Sagem, Thales, Thomson et TF1) se sont engagés à « développer un environnement favorable au haut débit ».
Quel cadre réglementaire ?
Bref, si le cadre technique est en place (ou sur le point de l’être) pour lancer des offres multiservices innovantes, il reste à définir le cadre réglementaire. « Comme sur tout nouveau marché, les risques ne sont pas absents », rappelle le président de l’ART.
D’une part, quel acteur fournira les services de voix, Internet et télévision ? L’opérateur téléphonique, le FAI ou le diffuseur audiovisuel ? Et sous quel statut ? D’autre part, quelle instance sera chargée de contrôler ce marché, l’ART ou le CSA ? Loin de chercher le conflit, l’ART appelle le législateur à trancher. Ou plutôt à ne pas trancher. « Il serait souhaitable également que le législateur clarifie la définition de la communication publique en ligne et adopte des textes qui permettent effectivement au CSA de faire son travail légitime sur les contenus et à l’ART de faire son travail de régulation économique des réseaux », juge Paul Champsaur.
En effet, la polémique grandit avec le vote de la loi sur l’économie numérique (LEN) qui met le Net sous la coupe du CSA. Cela à cause d’un terme mal choisi.
La LEN parle de « communication audiovisuelle » pour Internet là ou « communication électronique » aurait plus de sens…
Enfin, la TV ADSL s’inscrira aux côtés des modèles déjà existants : télévision hertzienne, satellite, câble et l’hypothétique télévision numérique terrestre (TNT) sans cesse repoussée.
Et dans ce domaine, l’ART ne pourra que « favoriser l’exercice d’une concurrence effective, loyale et durable au bénéfice des utilisateurs », notamment en observant un principe de neutralité des technologies. Le « marché » fera le reste.
[source – vnunet.fr]