NoosTV : les dessous d’une campagne antipiratage

Le câblo-opérateur part en guerre contre l’accès irrégulier à son réseau de chaînes de télévision. Il lance une offensive pour inciter ses utilisateurs à ne plus se servir de cartes pirates pour décodeurs, et à payer pour bénéficier de ses services.

Noos, marque commerciale de Suez Lyonnaise Telecom, a décidé d’intensifier sa lutte contre l’accès abusif aux chaînes de télévisions de son service NoosTV. Le câblo-opérateur va se lancer fin novembre dans une vaste opération de « régularisation des accès à son réseau ».

Mais en creusant un tant soit peu, il s’avère que l’opérateur en profite pour accompagner l’offensive d’une « opération commerciale », nous explique-t-on chez Noos – et non d’une simple chasse au fraudeur. Noos est en fait confronté à deux situations : d’un côté la recrudescence de cartes pirates, celles utilisées dans les décodeurs numériques pour donner accès à toutes les chaînes (plus d’une centaine, dont les films à la demande…) sans en payer le prix ; de l’autre, des immeubles dans lesquels des occupants accèdent à des chaînes sans payer.

Une invitation à la régularisation

La société a ainsi répertorié, essentiellement en Île-de-France, « plusieurs milliers d’immeubles », où les occupants reçoivent peut-être près d’une vingtaine de chaînes sans payer. Une situation qui résulte soit d’un « bricolage » dans les installations de l’immeuble, soit de la poursuite anormale d’un accès après le départ du précédent occupant des lieux.

L’opérateur, qui n’est pas en mesure de localiser géographiquement avec précision ces accès frauduleux, explique dans un communiqué qu’il va recourir à la dissuasion avec une campagne de « prévention et de communication ». Ce sera l’occasion, espère-t-il, de recenser les accès irréguliers et de proposer à leurs bénéficiaires un contrat payant… Une affiche sera pour cela placardée dans les halls d’entrée d’immeubles, et un courrier distribué dans les boîtes aux lettres, invitant les habitants à régulariser leur situation en contactant le service commercial. Au passage, un conseiller clientèle proposera « l’abonnement qui convient le mieux aux besoins et usages de la personne concernée ». Opportunément, Noos lance en ce moment une campagne de promotion (service de base à quatre euros par mois).


Seconde phase, il interviendra dans chaque immeuble afin de « couper tout accès abusif aux chaînes du réseau Noos ». Attention, il ne s’agit pas de cibler les immeubles offrant un accès à seulement une dizaine de chaînes dans le cadre du « service collectif ». Ce dernier est payé par le syndic de l’immeuble, en l’absence d’une antenne collective hertzienne.

Intimider le fraudeur usager de cartes pirates

Mais combien d’abonnés « fantômes » iront déclarer à l’opérateur qu’ils bénéficient d’un service sans le payer ? Comme Noos connaît la réponse (proche de zéro…), la société utilise parallèlement l’argument de la légalité en intimidant les utilisateurs de cartes pirates utilisées dans les décodeurs numériques. Ces petits malins ont ainsi accès à un service « premium », normalement facturé 59 euros, pour le prix d’un service de base… Sans compter que les fausses cartes donnent accès aux programmes « pay per view ».

Afin de « sensibiliser les fraudeurs sur les risques encourus », une vaste campagne de dissuasion sera lancée dans la presse nationale le 25 novembre. Une première pour Noos qui n’a jamais communiqué sur ce problème. Slogan : « Achetez une fausse carte Noos et recevez des chaînes en plus », comprendre… des menottes. Une référence à deux récentes condamnations de fraudeurs prononcées en octobre. Le tribunal de Créteil a ainsi condamné un utilisateur à trois mois de prison avec sursis et à 250 euros d’amende pour avoir utilisé une carte pirate. Le TGI de Paris a quant à lui condamné les membres d’un réseau de fournisseurs de cartes à des peines allant jusqu’à trois mois de prison ferme pour le receleur.

Parallèlement, cette campagne de communication sera accompagnée de « contre-mesures techniques ponctuelles qui visent à neutraliser et à rendre inutilisables les cartes TV piratées », poursuit Noos. Le câblo-opérateur va ainsi intensifier ses « attaques » informatiques à distance pour désactiver les cartes pirates. Ces attaques, baptisées « opération écran noir », ont débuté fin septembre dernier ; la fréquence utilisée est tenue secrète par l’opérateur. Mais en fait, après une attaque de ce type, il suffit au pirate de reprogrammer sa carte avec un nouveau code trouvé sur le net. « L’objectif est de mettre des bâtons dans les roues des fraudeurs le plus régulièrement possible », explique-t-on chez Noos.

L’opérateur n’a pas souhaité révéler le budget total de cette campagne anti-piratage tous azimuts. Il préfère également tenir secrète la valeur financière du manque à gagner causé par le piratage, qu’il qualifie d’« important ».

[source – ZDNet.fr]